La Ligue 1 a pris mercredi un virage qui peut se révéler décisif aussi bien en haut qu'en bas du tableau. La 27e journée ressemble à s'y méprendre à un grand tournant dans le long fleuve pas toujours tranquille d'une saison qui n'en finit pas. Le mano-a-mano bascule d'un seul trait du côté du champion en titre qui n'a pas tremblé à La Marsa, devant un ensemble, il est vrai, pas autant motivé que son rival. N'en déplaise au coach banlieusard, Gérard Buscher qui annonçait pourtant la veille de la rencontre que son équipe allait assurer le rôle d'arbitre impartial. Elle tenta de le faire avec les moyens qui sont les siens en cette fin de parcours. L'arbitrage des deux outsiders a été d'une intensité inégale, faut-il admettre au bout du compte. «J'ai vu cet après-midi un club sfaxien qu'on pouvait aisément croire défendre sa peau et pour lequel ce match était subitement devenu une affaire de vie ou de mort, analysait le coach cabiste Maher Kanzari non sans étonnement. Vous savez, s'ils avaient régulièrement évolué à ce niveau de jeu cette saison, les Noir et Blanc seraient aujourd'hui champions indiscutables». Un tel constat non dénué d'amertume, mais également de sous-entendus traduit en tout cas l'état d'esprit général qui prévalait mercredi soir à Bizerte, après le semi-échec (2-2) qui risque de peser lourdement au moment du décompte final. On appréhendait sérieusement la venue du CSS. On laissa dans ce classique une partie de ses chances d'enlever le titre du championnat 2011-2012. Et la frustration a pris une ampleur telle que les inévitables accrochages d'après-match ont attisé le feu des passions malsaines. On rapporte des scènes d'échanges pas trop tendres entre certains joueurs sfaxiens et le clan cabiste. En fait, rien de nouveau sous le soleil de la ville de l'Evacuation traumatisée par le mauvais tour joué par Idrissa Kouyaté et ses copains, et par l'incroyable fébrilité démontrée par le tandem Larbi Jabeur-Karim Ben Amor à l'axe d'une arrière-garde qui pouvait facilement passer avant-hier pour celle d'un club divisionnaire. L'ESBK et l'ASG, sauf surprise Le CAB est le premier à craquer. Le moins expérimenté parmi le tandem de candidats au titre accuse désormais deux points de retard qu'il espère ne pas traîner comme un boulet d'ici au 30 septembre, date du baisser de rideau. Toute la saison durant, «Sang et Or» et Cabistes s'épiaient tels de vieux chasseurs de prime. A trois encablures de l'arrivée, tous deux ne sont pas près de baisser la garde. Loin s'en faut, d'autant que de nouveaux rebondissements ne sont pas à exclure après le choc ESS-CAB de la prochaine journée et le grand derby EST-CA de celle d'après. En fait, l'EST reçoit l'AS Gabès (28e journée), puis le CA (29e J) avant de conclure devant le ST (30e J). De son côté, le CAB va à Sousse pour rencontrer l'ESS (28e J), reçoit l'OB (29e J) et conclut à La Marsa (30e J). Alors, faites vos jeux! Sur l'autre versant de la compétition, la tendance est un peu plus prononcée pour condamner l'Avenir de Gabès (22 points) et, a fortiori, l'Etoile de Béni Khalled (20 pts). Même si l'Espérance de Zarzis (27) et le Club Sportif d'Hammam-Lif (26) n'ont pas toujours la tête hors de l'eau. Il faut pourtant admettre que ces deux derniers mal classés ont marqué avant-hier des points décisifs en battant justement les deux derniers de la classe. Si le onze conduit par Mokhtar Tlili nourrit toujours l'espoir de renverser la vapeur, en revanche, côté Khalladi, la messe est carrément dite d'autant que les Capbonais sont à six points du premier non relégable. Avec son flair de vieux jeune routier, l'entraîneur Jalel Kadri l'a parfaitement saisi en donnant hier sa démission. Un aveu, on ne peut plus clair que cela devient vraiment mission impossible. Le programme qui attend les quatre postulants au maintien se présente comme suit : - ESBK (20 points) : va à Sfax (CSS), reçoit l'ESS et va à Béja (OB) - ASG (22 pts) : va à Tunis (EST), reçoit le ST et va à Monastir (USM) - CSHL (26 pts) : va à Tunis (ST) reçoit l'USM et va à Zarzis (ESZ) - ESZ (27 pts) : reçoit la JSK, va à Hammam-Sousse (ESHS) et reçoit le CSHL. Comme on peut le constater, les «Sang et Or» du Sud en plus des cinq points qu'ils comptent sur le premier relégable, possèdent l'avantage non négligeable de jouer deux fois sur trois à domicile et de conclure leur saison par la réception d'un concurrent direct en l'occurrence les «Verts» de Hammam-Lif. D'aucuns avancent néanmoins que les dés sont d'ores et déjà jetés. Leurs défaites de mercredi condamnent irrémédiablement Khalladis et Gabésiens. Mais en football et à plus forte raison dans l'univers quelque peu particulier du football tunisien, il ne faut jamais jurer de rien. La révolution et le nouveau souffle qu'elle apporte ne paraissent guère avoir d'emprise sur les réflexes ataviques des alliances et des petits services rendus entre amis. Des accusations et de fausses innocences... Un championnat clean, il faudra attendre peut-être la semaine des quatre jeudis pour en avoir un pouvant servir de modèle et de référence.