La grogne a gagné, ces trois derniers jours, le secteur des assurances et le secteur bancaire. Obligés de se taire jusqu'ici, les employés de certaines banques ainsi que des sociétés d'assurances comme la Star ont laissé éclater leur colère, très longtemps réprimée, dénonçant les abus et les dépassements de la direction générale. Hier, une tête est encore tombée. Le P.-d.g. de la BNA, M. Moncef Dakhli, a dû sortir par la porte de derrière, conspué par les employés de la banque qui, tôt le matin, ont voulu le déloger de son bureau, situé au septième étage de l'immense bâtisse, mais qui n'ont pu le faire, à cause de l'accès aux ascenseurs qui était bloqué. Le président-directeur général semble avoir laissé derrière lui un tableau peu reluisant de ses activités. Selon les dires d'un employé de la banque travaillant depuis vingt-neuf ans au sein de la BNA, bien avant qu'il ne devienne président-directeur général, M. Dakhli avait déjà commencé à exploiter la position qu'il occupait, à savoir celle de directeur des crédits, pour se livrer à des opérations irrégulières, d'après les dires de Adel Bouallègue, employé de la banque. Preuves à l'appui, souligne cet employé de banque, sur chaque crédit accordé à un grand ponte des affaires, ce dernier aurait perçu une commission. Une de ces opérations va, d'ailleurs, susciter la révolte des employés. Il y a quelques années, alors qu'il était encore responsable des crédits, M. Dakhli avait, en effet, demandé à un chef d'agence de la banque d'accorder un gros crédit à un homme d'affaires. Le chef d'agence refuse mais finit par céder sous la pression et sera emprisonné. «A l'époque, M. Dakhli avait nié le fait qu'il ait demandé au chef de l'agence de l'avenue de Londres d'accorder un crédit à sa demande à un homme d'affaires. Ce chef d'agence en a payé les frais», poursuit l'employé de banque. Nommé en 2004 président-directeur général, M. Dakhli aurait fait le vide autour de lui, poussant à la retraite anticipée les compétences qui l'entourent et faisant nommer un directeur central du personnel chargé de surveiller toutes les entrées et sorties des employés, selon les dires des employés de la banque. «Il avait désigné un directeur général administratif qui lui obéissait au doigt et à l'œil», souligne un employé de la banque. Occupant les fonctions de P.-d.g, M. Dakhli continue à superviser les opérations de crédit qui doivent toutes recevoir son aval... A la société tunisienne d'assurances et de réassurances (Star), le siège de président-directeur général est vide depuis deux jours. Les membres du syndicat sont montés avant-hier pour lui demander de quitter les lieux. Ici aussi, la colère grondait depuis longtemps chez les employés. Ce dernier reprochait à Abdelkrim Merdassi, P.-d.g de la société, de rester sourd à leurs revendications sociales (avancement, primes...), alors que le chiffre d'affaires de la société n'a cessé de croître. Après l'organisation de grèves et la publication de plusieurs communiqués exposant la situation, et face à l'absence totale de dialogue avec la direction générale, c'est le ras-le-bol. Les employés ont décidé d'avoir recours à la force. Aujourd'hui, ils sont seuls maîtres à bord.