Le président Caïd Essebsi a examiné, hier, avec le ministre des Affaires étrangères, Khemaïs Jhinaoui, les mesures diplomatiques à prendre Tout en soulignant qu'il n'est pas admis de porter atteinte aux droits de la femme tunisienne, quels que soient les motifs, le chef de l'Etat a indiqué qu'il est indispensable d'aplanir ces problèmes dans les plus brefs délais, dans le souci de préserver les relations de fraternité et de coopération tuniso-émiraties Le président de la République, Béji Caïd Essebsi, a discuté hier avec le ministre des Affaires étrangères, Khemaïes Jhinaoui, des actions diplomatiques à prendre suite à la décision émiratie portant interdiction aux femmes tunisiennes d'entrer aux Emirats arabes unis, même pour un transit. La compagnie aérienne Emirates avait interdit, vendredi dernier, à des passagères tunisiennes de se rendre à Dubaï sur le vol Emirates EK 748, au départ de l'aéroport Tunis-Carthage. Cette mesure a concerné toutes les passagères tunisiennes, même celles accompagnées de leur conjoint, à l'exception des Tunisiennes résidant aux Emirats arabes unis. Cette interdiction a provoqué des perturbations à l'aéroport. «Au cours de cette rencontre, le chef de l'Etat a réaffirmé la nécessité de préserver la dignité de tous les citoyens tunisiens aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays», a déclaré Jhinaoui à l'issue de l'entretien. Pour Caïd Essebsi, «il n'est pas admis de porter atteinte aux droits de la femme tunisienne quels que soient les motifs», a-t-il ajouté. Aplanir les problèmes Caïd Essebsi a aussi jugé indispensable d'aplanir ces problèmes dans les plus brefs délais dans le souci de préserver les relations de fraternité et de coopération tuniso-émiraties. «La décision portant suspension des vols de la compagnie aérienne émiratie en Tunisie demeure en vigueur jusqu'à ce que cette compagnie révise les mesures de voyage des Tunisiennes conformément aux conventions internationales en vigueur», a-t-il tenu à préciser. Le ministère du Transport avait annoncé, dimanche soir, la suspension des vols de la compagnie aérienne «Emirates Airlines» vers et en partance des aéroports tunisiens, jusqu'à ce que cette compagnie trouve des solutions appropriées et agisse conformément aux réglementations et aux conventions internationales en vigueur. Selon un communiqué de la présidence de la République, la rencontre a, d'autre part, porté sur les prochaines échéances diplomatiques, dont notamment la visite attendue du président turc Recep Tayyip Erdogan en Tunisie les 26 et 27 décembre 2017. Menaces d'attentats Des renseignements sur des menaces d'attentats aux Emirats arabes unis seraient à l'origine de la mesure prise par les compagnies aériennes émiraties à l'encontre des voyageuses tunisiennes, a annoncé, hier, la porte-parole de la présidence de la République Saïda Garrach. «Les Emirats arabes unis disent craindre un attentat pouvant être commis par des femmes tunisiennes ou des femmes titulaires d'un passeport tunisien», a dit Garrach sur les ondes de la radio Shems FM. D'après la porte-parole de la présidence de la République : «Il y a des informations sécuritaires sérieuses chez les autorités émiraties sur la possibilité d'attentats terroristes». Elle a précisé que ces renseignements sont liés au retour des terroristes essentiellement de Syrie et d'Irak». Par ailleurs, Garrach a dit comprendre la décision des autorités émiraties dans la mesure où elles visent à protéger leurs citoyens et territoires jugeant, toutefois, «inadmissible» la manière dont ont été traitées les voyeuses tunisiennes. «Ce qui se passe entre la Tunisie et les Emirats arabes unis ne peut pas être qualifié de crise diplomatique», a-t-elle assuré. La compagnie aérienne «Emirates» avait interdit, vendredi dernier, aux femmes tunisiennes de voyager à bord de ses appareils en direction de Dubaï. La direction générale de l'aviation civile relevant du ministère du Transport était intervenue auprès de l'aviation civile émiratie pour demander la levée définitive de cette mesure qui a concerné toutes les femmes tunisiennes, même celles qui étaient accompagnées de leur époux ou de passage à Dubaï (transit). Un peu plus tard dans la journée, l'ambassadeur de l'Etat des Emirats arabes unis (EAU) à Tunis, Salem Issa Elkattam Zeabi, a été reçu au ministère des Affaires étrangères, où il a été invité à «fournir des éclaircissements» sur cette mesure. Le diplomate émirati a affirmé que cette «mesure était provisoire et liée à des réglementations sécuritaires». Il a été également reçu le même jour par le chef du gouvernement, Youssef Chahed. Cellule de crise à Tunis Des responsables tunisiens du ministère du Transport et de celui de l'Intérieur ainsi que de l'Office de l'aviation civile et des aéroports (Oaca) et des représentants de l'Aviation Emiraties ont tenu hier une réunion d'urgence en Tunisie pour créer une cellule de crise en vue de mettre en place des règlements relatifs à l'exécution de la décision prise par la Tunisie concernant la suspension des voyages d'une compagnie aérienne «Emirates» à Tunis, suite à l'interdiction de cette dernière de transporter les Tunisiennes à bord de ses vols, a appris l'agence TAP auprès de la cellule de presse au ministère du Transport. La compagnie d'aviation Airlines a publié sur son compte twitter, depuis 12 heures que «suite aux instructions des autorités tunisiennes, la compagnie suspend à partir de lundi ses voyages de et vers Tunis jusqu'à nouvel ordre». La même source a indiqué que la commission, actuellement en cours de composition, vise à identifier des règlements pour mettre en œuvre la décision de suspendre les voyages et ses impacts ainsi qu'à alléger la pression, jusqu'à l'identification des solutions du problème survenu, dans le cadre du respect des accords signés entre les deux pays. A la suite d'une intervention officielle de la part de la Tunisie, la compagnie aérienne «Emirates» avait levé de manière exceptionnelle l'interdiction de voyage pour les Tunisiennes à partir de Tunis et les a autorisées, vendredi après-midi, à voyager à bord de ses avions après une interdiction qui a suscité la colère et l'indignation des voyageurs et a été dénoncée par la société civile et certains partis politiques. Toutefois, cette mesure d'interdiction des Tunisiennes de voyager à son bord «Emirates» demeure encore en vigueur pour les Tunisiennes résidentes à l'étranger. A noter que le ministre émirati des Affaires étrangères, Anwar Mohammed Qarqash, a indiqué, dimanche sur son compte twitter, à propos de l'interdiction faîte aux Tunisiennes de voyager à bord des compagnies émiraties, «nous avons contacté les frères tunisiens à propos d'une information sécuritaire qui a exigé des mesures bien déterminées et conjoncturelles...». Grogne générale Des partis politiques ont dénoncé, hier, une mesure «discriminatoire» prise par «Emirates Airlines» à l'encontre des voyageuses tunisiennes. La décision des compagnies aériennes émiraties d'interdire aux Tunisiennes d'embarquer sur leurs vols à destination des Emirats arabes unis est «injustifiée», s'est indigné le mouvement Nida Tounès, ajoutant que cette mesure est contraire aux lois et conventions internationales, notamment celles relatives de l'aviation civile. Le parti a appelé la diplomatie tunisienne à agir avec « fermeté « pour défendre les droits des citoyens tunisiens et prendre les mesures qui s'imposent pour contenir la crise. Pour sa part, le Parti des travailleurs a qualifié de « surprenante « la décision» des deux compagnies aériennes émiraties d'interdire aux Tunisiennes d'embarquer sur leurs appareils vers et à partir des aéroports des Emirats arabes unis sans donner aucune précision à ce sujet. «La décision des compagnies aériennes émiraties, et une provocation», s'est insurgé, le parti dans un communiqué rendu public hier est dénonçant ainsi une mesure «discriminatoire» à l'encontre des Tunisiens en général et des femmes tunisiennes en particulier. «Il s'agit non seulement d'une atteinte au droit à la mobilité des femmes tunisiennes mais également d'une atteinte à la dignité du peuple tunisien tout entier», a-t-il martelé. Le parti a également demandé aux autorités tunisiennes de se montrer «fermes», dénonçant un «mutisme injustifié» face à cette infraction contre les lois internationales relatives à l'aviation civile. Le mouvement Harak Tounès Al Irada a, pour sa part, condamné une décision «arrogante» et «surprenante» qui viole le droit à la mobilité ainsi que toutes les conventions internationales relatives à ce sujet. «La Tunisie aurait dû agir avec fermeté», a souligné le parti dans un communiqué dénonçant toute tentative de chercher des justifications pour cette décision «humiliante». De son côté, le mouvement Ennahdha a qualifié de «discriminatoire et humiliante» la décision des compagnies aériennes émiraties d'interdire aux femmes tunisiennes d'embarquer sur leurs vols. Ennahdha a dit soutenir la décision du chef de l'Etat et des autorités tunisiennes de suspendre les liaisons quotidiennes de la compagnie aérienne «Emirates» en raison de l'imbroglio qui persiste autour du droit des voyageuses tunisiennes à embarquer sur des vols à destination des Emirats.