Une marche de protestation s'est ébranlée, hier, du Palais de Justice à Tunis en direction de la place du Gouvernement à La Kasbah pour réclamer la validation par la présidence du gouvernement des «membres désignés» du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Selon les protestataires, «la réticence du gouvernement à valider la liste des membres proposés est à l'origine du retard pris dans l'entrée en vigueur du Conseil». Rassemblés place du gouvernement à La Kasbah, les protestataires ont plaidé en faveur de l'indépendance de la magistrature et appelé à placer la justice à l'abri des tiraillements politiques. Présente à cette manifestation, la présidente de l'Association des magistrats tunisiens (AMT), Raoudha Karafi, a dénoncé les graves dérapages ayant accompagné la mise en place du CSM, citant notamment le dépassement des délais constitutionnels et la prestation de serment des membres du Conseil, alors que sa composition n'est pas encore complète. « La prestation de serment devrait normalement avoir lieu une fois la composition du CSM complétée», a-t-elle lancé. Les membres du CSM avaient prêté serment, mercredi 14 décembre, lors d'une cérémonie qui s'est déroulée au Palais de Carthage, sous la présidence du président de la République, Béji Caïd Essebsi. Selon le vice-président de l'Association des magistrats tunisiens, Anas Hamadi, ce rassemblement sera suivi d'un sit-in illimité au siège de l'AMT. Il sera placé sous le signe « sit-in du redressement du processus de mise en place du CSM». « D'autres mouvements de protestation sont envisagés allant jusqu'à l'organisation d'une grève générale dans l'ensemble des tribunaux de la République», a-t-il averti. Hamdi M'rad, membre du bureau exécutif de l'AMT, n'a pas exclu la possibilité de saisir le Tribunal administratif pour statuer sur cette question. Issu des élections du 23 octobre dernier, le CSM est composé de 45 membres répartis sur trois conseils judiciaires, à savoir l'ordre judiciaire, l'ordre administratif et l'ordre financier. Quelque 33 membres sont élus, alors que les 12 autres sont désignés, soit 4 membres pour le Conseil de l'ordre judiciaire, 4 pour le Conseil de l'ordre administratif et 4 pour le Conseil de l'ordre financier, conformément à la loi organique n°2016-34 portant création du Conseil supérieur de la magistrature. Le Syndicat des magistrats tunisiens (SMT) a appelé les membres du CSM à assister à la première réunion du conseil, conformément à l'article 36 de la loi relative au CSM. Il faut éviter le vide causé par la fin de la mission de l'Instance provisoire de l'ordre judiciaire, recommande le syndicat Le syndicat a estimé, hier, dans un communiqué, que le premier responsable de la situation du CSM est l'Instance provisoire de l'ordre judiciaire qui n'a pas rempli, depuis août dernier, le seul poste vacant dans l'ordre judiciaire, à savoir le poste de procureur général de la République près la Cour de cassation. Le président de l'Instance provisoire est tout aussi responsable, selon le syndicat qui «a refusé de convoquer la première séance du CSM au bout d'un mois de la réception des résultats comme le prévoit la loi». Pour le syndicat, l'Instance provisoire «a présenté des candidatures à des postes importants à une période suspecte après le parachèvement de la composition du CSM». «Cela constitue une violation manifeste de la Constitution», a-t-il déploré. Sur un autre plan, le syndicat a rappelé que «depuis la prestation de serment, le 14 décembre dernier, par les membres du conseil, l'Instance provisoire de l'ordre judiciaire n'a plus lieu d'être». La réunion du CSM a été reportée au 29 décembre pour absence de quorum, deux tiers (2/3) des membres étant requis pour tenir la réunion, selon Imed Khaskhoussi, membre du CSM.