Les deux journalistes encore en vie, selon le ministre des Affaires étrangères, à qui le Snjt et ses partenaires ont demandé de passer à l'action et de faire preuve de plus de pragmatisme. Le 8 septembre de chaque année décrété désormais, avec l'ONU, journée nationale pour la sécurité et la protection des journalistes. Un peu plus de 365 jours après la disparition en Libye des deux journalistes tunisiens, Sofiène Chourabi et Nadhir Ktari, l'affaire semble faire du surplace. Morts ou vivants, qui sait ? Des rumeurs ont été colportées, d'ici et d'ailleurs, sans suite aucune. Et des flux d'informations autant imprécises que confuses n'ont fait, à chaque fois, que taper sur les nerfs de leurs familles, mais leur redonnant souvent de l'espoir. Entre-temps, ni la partie tunisienne ni celle sur nos frontières sud n'ont eu le courage d'apporter la vérité recherchée. Même pas la cellule de crise timidement constituée au sein du ministère des Affaires étrangères, se faisant passer pour l'interface qui pouvait, alors, garantir le relais de communication sur le sujet. Mais ce n'était, semble-t-il, que de la poudre aux yeux, comme l'a affirmé un des parents des disparus. Un an plus tard, l'affaire refait aujourd'hui surface, avec de bonnes nouvelles qu'on espère, cette fois-ci, sûres. La première vient de la bouche du chef de la diplomatie, M. Taïeb Baccouche, dans ses récentes déclarations sur les ondes de Shems FM, selon lesquelles les deux journalistes au sort inconnu sont encore en vie. A l'en croire, ce sont, preuves à l'appui, des informations bien confirmées. Cette nouvelle, faisant boule de neige, n'a pas laissé la corporation des journalistes indifférente. Au siège du Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt) à Tunis, la Coalition civile pour la vérité sur Sofiène et Nadhir a tenu, hier, une conférence de presse pour rebondir sur les faits, relever les dernières avancées dans ce dossier et répondre à la question : « Sofiène et Nadhir : l'incertitude jusqu'à quand ? ». Et le président du Snjt, M. Neji Bghouri, d'affirmer avec confiance : « Nous avions une profonde conviction que nos collègues sont encore vivants ». Face au mutisme du gouvernement tunisien, rappelle-t-il, on a souvent demandé aux parties officielles d'assumer leurs responsabilités dans la découverte de la vérité et de rassurer sur le sort des deux journalistes. Campagne auprès des médias Son allocution n'a pas aussi manqué de critiques et de reproches à l'encontre du gouvernement en place. Il ne suffit pas de donner la nouvelle sans prendre la peine d'aller jusqu'au bout. « On veut quelque chose de sûr et de pragmatique», plaide M. Bghouri. Dans ce contexte, il a, également, évoqué l'intérêt qu'accorde le président de la République, Béji Caïd Essebsi, à ce dossier. « Toutefois, l'on ne voit, hélas, que des déclarations et des contre-déclarations. Alors qu'il demeure utile d'être clair et lucide dans la fixation des délais pour le retour de nos collègues », a-t-il dénoncé. Somme toute, se rétracte-t-il, le chef de l'Etat semble manifester une attention particulière à la protection des journalistes. D'ailleurs, en coordination avec l'ONU, l'on a décrété, désormais, une journée nationale pour la sécurité et la protection des journalistes qui sera célébrée le 8 septembre de chaque année. Une sorte d'hommage rendu à Sofiène et à Nadhir, et à travers eux toute la profession qui mérite, aujourd'hui, d'être promue. Le président du Snjt a fini par annoncer l'organisation, dans les jours à venir, d'une vaste campagne de sensibilisation quant à l'amélioration de la situation professionnelle et matérielle des journalistes tunisiens. Sur la même ligne Revenant sur l'affaire, Mohamed Salah Khriji, de la Ligue tunisienne des droits de l'homme (Ltdh), a insisté sur l'optimisation du rôle de la commission d'enquête sur les deux journalistes pris en otage, l'ultime but étant de fixer la date de leur retour. Et là, de son avis, la pression sur le gouvernement reste de mise, jusqu'à ce qu'il réponde à l'appel de leurs parents en détresse. Même son de cloche du côté de RSF. Sa représentante, Yasmine Kacha, a déclaré que son organisation est aussi sur la même ligne dans la défense des intérêts des journalistes. Elle a affirmé avoir recommandé la constitution d'une telle commission ad hoc chargée du suivi du dossier en question, afin de savoir comment traiter l'affaire Chourabi et Ktari depuis leur disparition en septembre 2014. Et la justice aura aussi son mot à dire en ce qui concerne les informations qui lui sont parvenues à ce propos. Sans pour autant oublier, a-t-elle ajouté, le soutien qu'avaient apporté certains journalistes libyens tout au long de l'enquête. M. Mohamed Hedi Tarchouni, du syndicat général de l'information, a abordé un autre volet de la question : la protection des journalistes et les législations propres à la profession. Pour lui, le fait de réinscrire à l'ordre du jour de l'ARP le projet de loi sur le droit d'accès à l'information est, en soi, une partie de la solution, voire une réponse aux revendications corporatives. Par contre, le projet de loi relatif à la répression des atteintes aux forces de l'ordre n'est, en réalité, que le revers de la médaille, de plus en plus liberticide.