Seulement 0,9% de croissance. C'est ce que devrait enregistrer l'économie du pays à la fin de cette année 2023. Elle se situe en-deçà du croît démographique. Quel épouvantable record ! Le Fonds monétaire international (FMI) a été plus optimiste en estimant à 1,3% le taux de croissance économique de la Tunisie en 2023. En tout cas, on est loin de l'objectif initialement fixé par la loi de finances 2023 : 1,8%. Bref, on a fait moitié moins. Et bien moins encore que le taux de croissance mondiale estimé à 3% par le FMI. Le pays perdra-t-il encore des places sur la liste des pays les plus compétitifs qu'établit annuellement le Forum économique mondial de Davos et publie en janvier à l'occasion de la tenue de son forum annuel ? En tout cas, ce résultat n'a pas été sans incidences sur les prévisions budgétaires consignées dans la loi de finances 2023. Car, si les objectifs de ressources n'ont pas été atteints, le manque à gagner serait de l'ordre de 3,4 milliards de dinars compte non tenu des dons (1,2 milliards de dinars), les prévisions de dépenses ont, elles aussi, volé en éclat. Les dépenses du budget de l'Etat atteindraient cette année 56 milliards de dinars contre 54 milliards prévus par la loi de finances initiale. Les deux milliards ont été alloués au budget d'intervention, autant dire à la compensation, dont le montant est passé de 17,2 milliards à 19,2 milliards. Cela représente quatre fois plus que le budget d'investissement. Plus généralement, la boulimie dépensière de l'Etat ne semble pas connaître de frein. Résultat, le déficit budgétaire s'est creusé plus que prévu atteignant 7,7% du PIB contre une prévision de 5,2%. Ce même ratio a été enregistré en 2022 et 2021. Du coup, les besoins de financement ont augmenté nécessitant un recours accru à l'emprunt. Le gouvernement devra solliciter 25,9 milliards de dinars d'emprunt pour boucler son budget 2023 soit 2,5 milliards de plus que ce qui était prévu. L'encours de la dette publique va encore augmenter cette année, franchissant la barre des 80% du PIB. Quant à la pression fiscale, elle a gagné des points supplémentaires passant de 24,7% à 24,9%. On ne cessera jamais de le dire, la stabilité budgétaire ne se résout pas à coup d'emprunt au risque d'hypothéquer l'avenir de la jeunesse de ce pays ou à coup d'augmentation de taxes et de contributions fiscales qui rognent le pouvoir d'achat et n'incitent guère à l'investissement. Pourtant, c'est la même trajectoire que ses prédécesseurs que semble prendre le gouvernement de Ahmed Hachani, persistant dans les mêmes choix d'accroître les dépenses sociales au détriment de l'investissement, d'accroître la pression fiscale et de recourir à davantage d'emprunt pour honorer un service de la dette de plus en plus envahissant. Celui-ci est passé de 14,5 milliards de dinars en 2022 à 20,8 milliards en 2023. Tous les postes de dépenses du budget vont connaitre une augmentation en 2024. Globalement, ce sont près de 4 milliards de dinars de dépenses de plus que 2023. Un milliard de dinars environ vont gonfler le budget déjà conséquent des rémunérations, 500 MD de dinars iront renforcer le budget d'intervention, battant ainsi un nouveau record à 19,7 milliards de dinars en 2024 et seulement 5,3 milliards de dinars seront alloués au budget d'investissement de l'Etat en 2024. Le processus de maîtrise de la masse salariale reste poussif et la réforme de la compensation n'est pas pour bientôt. S'agissant de cette dernière, la solution qui semble s'esquisser serait de faire payer ceux qui en profitent indirectement. A la solution structurelle, on a préféré bricoler une solution de replâtrage consistant à accroître les impôts et redevances de toute sorte et enregistrer ainsi un nouveau record de pression fiscale qui dépassera pour la première fois la barre des 25% du PIB, restreignant davantage les marges de manœuvre des agents économiques. Cela n'évitera pas à l'Etat de recourir une fois de plus à l'emprunt. Pour boucler son budget 2024, le gouvernement devra emprunter 28,2 milliards de dinars contre seulement 21,9 milliards en 2023. Sur ces 28,2 milliards, 24,7 milliards sont destinés à rembourser le service de la dette (6,8 milliards de dinars d'intérêt et 17,9 milliards de principal). Sortira-t-on un jour de ce tourbillon infernal d'accroissement des dépenses qui ne peut être satisfait qu'à la faveur d'un accroissement de la pression fiscale et une surcharge d'endettement pour répondre aux seules attentes sociales délaissant les exigences économiques du moment ?