La première chambre criminelle du tribunal de première instance de Tunis vient d'examiner une affaire de trafic de voitures, survenue il y a quelque temps et dont le catalyseur est une jeune fille d'à peine vingt ans. Sept suspects étaient au banc des accusés. Ils avaient fait appel de l'arrêt de la chambre criminelle, les inculpant de constitution de bande de malfaiteurs en vue d'atteinte sciemment aux biens d'autrui, détention et port d'armes blanches prohibées, contrebande et vente de marchandises interdite, ainsi que de trafic de devises. La jeune fille procédait toujours de la même façon, en tendant des traquenards aux automobilistes, auxquels elle faisait à chaque fois croire qu'elle était victime d'un accident. Sa méthode ne ratait jamais, puisque ceux-ci s'arrêtaient à tous les coups afin de porter secours à la belle créature. Une fois dans la voiture, elle essayait de sympathiser au maximum avec l'âme charitable en lui demandant de la ramener chez ses parents à Raoued. Là et dans un endroit assez retiré, ses complices intervenaient pour surprendre le conducteur et faire le reste du travail. En effet l'une des victimes, un quinquagénaire racontait qu'il était pris dans le piège à fond. La jeune fille lui fit croire qu'elle était monitrice dans une école de danse au Caire. Elle lui demanda à un moment donné de s'arrêter à un endroit assez désert. Là il fut surpris par deux énergumènes dont l'un armé d'un couperet, l'obligea sous la menace et la violence à quitter son véhicule. Rossée de coups la victime atterrée regardait impuissant ses agresseurs partir avec sa voiture en toute vitesse. Elle ne put que se diriger vers le poste de police le plus proche afin d'y relater sa mésaventure. Plusieurs autres personnes avaient été victimes du même scénario, par lequel elles étaient dépossédées de leurs véhicules. Une minutieuse enquête menée par la brigade criminelle, a abouti à l'arrestation de la jeune fille qui finit par dénoncer le chef de la bande. Celui-ci arrêté, s'avéra un vieux cheval de retour qui avait déjà maille à partir avec la justice. Condamné pour des faits similaires, il venait de purger une longue peine de prison. Le hasard a voulu qu'en prison, il fît la connaissance de trafiquants de véhicules qui étaient des as dans le domaine et qui opéraient entre la Tunisie et l'Algérie. Ils lui proposèrent de collaborer avec eux et ce n'était pas de refus de sa part, surtout qu'il était aux abois et n'avait ni subside ni soutien. A sa sortie de taule, il fit la connaissance de la jeune fille qui devint sa compagne et il lui proposa de servir d'appât. Les autres membres de la bande ont été recrutés sur le tas. L'enquête a permis de les arrêter tous. Ils avouèrent leur forfait et l'instruction a révélé que la bande s'adonnait également au trafic de certaines marchandises qu'elle importait ou exportait de manière clandestine. Les avocats de la défense sollicitèrent pour la plupart, les circonstances atténuantes à leurs clients. Quant en ce qui concerne les accusés qui nièrent les faits incriminés, ils demandèrent leur acquittement pour manque de preuves tangibles.