Canadienne, Hajra Waheed participe à l'exposition "Seen/Unseen" avec une vidéo d'art intitulée "The Spiral". Entre langage visuel et expression poétique, cette artiste interroge le mouvement, nos trajectoires et l'impuissance de la ligne droite. Hajra Waheed est l'une des cinq artistes internationales qui participent à l'exposition "Seen/Unseen" à la station d'art B7L9 à Bhar Lazreg. Son oeuvre prend la forme d'un texte poétique, scandé, parfois chuchoté ou murmuré et porté par une vidéo qui investit des circonvolutions spirales. Des circonvolutions spirales et métagéometriques Essentiel dans la démarche de l'artiste, le texte est l'élément central dans cette oeuvre visuelle qui se décline en sept minutes mouvementées qui semblent représenter un chaos en reconstruction/effondrement perpétuels. Ainsi l'oeuvre de Hajra Waheed participe d'une double articulation et se déploie dans l'abîme de nos yeux et le dédale de nos oreilles. Suivant les méandres infinis d'une spirale métaphysique/métagéometrique, le texte de Waheed est à la fois un éloge du mouvement et une réflexion sur l'hésitation, l'inachèvement, le déséquilibre. On y retrouve les failles et les ferments de toute action au sens philologique du terme. En affirmant que la spirale n'est pas une figure géométrique comme les autres, l'artiste aboutit à un autre constat selon lequel la ligne droite n'est pas la trajectoire la plus naturelle. Ce faisant, Hajra Waheed interroge nos vies, nos combats, nos victoires toujours différées et parfois nos reniements et nos reculades. Poignant, son texte épouse les hésitations de chacun en faisant toujours la part de l'émerveillement. Chez elle, l'éphémère devient fondamental en ce qu'il matérialise le fugace, le provisoire ou la rotondité des destins. Même prononcés à partir d'un seuil symbolique, les mots de Hajra Waheed semblent interpeller chaque conscience, chaque bribe de vécu qui en engendre une autre, dans une spirale sans fin, à laquelle on n'échappe jamais. La dialectique de l'encre et de la lumière Les images viennent très précisément se superposer au texte. Ainsi, leur sarabande effrénée devient une dimension cachée du texte. Elles opèrent comme si elles étaient des noumènes en mouvement, des structures dont les aberrations sont le reflet même de nos vies. Dans cette subtile dialectique de l'encre et de la lumière, Hajra Waheed se déploie personnellement, se raconte et nous raconte. Elle nous met face à l'inéluctable qui est fait d'inertie toujours relative et de mouvement qui agglomère ce qui se disperse pour l'agréger de nouveau avant de l'éroder encore. Si on n'échappe pas à la spirale, son tourbillon infini induit toutes les anabases, le recroquevillement et l'expansion. C'est dans cette dimension incommensurable que le poème de Hajra Waheed égrène les mots et les images, l'éternel retour et le point d'ancrage initial. Avec des termes choisis dans le lexique du quotidien ou les glossaires scientifiques, l'artiste nous enroule dans une spirale où chaque fin est un nouveau départ, chaque début un parcours inédit. Le texte de Hajra Waheed mérite d'être lu à l'aune de nos vies, comme un enchevêtrement de choix, un tourbillon de sens, un fruit du hasard objectif qui dit toutes les insuffisances des lignes droites. H.B