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« Si tout allait bien dans la vie, j'arrêterais de créer des spectacles!»
Publié dans Le Temps le 19 - 11 - 2020

Chorégraphe et danseur franco- tunisien vivant entre les deux rives de la Méditerranée, Sélim Ben Safia vient de présenter à Montreuil en France, « Chawchra », un spectacle à succès qu'il signe et interprète avec Marwen Errouine.
Cet artiste qui cartonne depuis quelque temps et dont le chemin de la réussite semble bien tracé, a bien voulu répondre à nos questions tournant autour de ses réalisations comme de ses projets. Entretien.
Le Temps : comment l'accueil à « Chawchara » s'est-il fait lors d'une première représentation, le 24 octobre au Théâtre Berthelot de Montreuil dans le contexte actuel de pandémie ?
Sélim Ben Safia : nous n'avions pas présenté « Chawchara » depuis le mois de Janvier, à cause de la Covid 19. Il y'a eu plusieurs rebondissements avec des reports de dates, des annulations, des changements d'horaires à cause du couvre-feu. Mais nous avons réussi à maintenir notre représentation à Montreuil. C'était un réel plaisir de retrouver la scène et le public. Cette date était unique car nous avons expérimenté une installation performative avec le photographe Mark Maborough, où nous avons dû déambuler dans le Théâtre en étant très proches du public. Après tous ces mois d'absence, c'était magique ! Le public était masqué et respectait les distanciations sociales, mais nous avons pu tout de même, percevoir leurs émotions.
*Après Montreuil et l'Institut du Monde Arabe Paris, au mois de décembre 2020, quelles sont les prochaines destinations pour votre spectacle ?
-Cette question est compliquée en ces temps incertains et les changements perpétuels de planning. Nous espérons que la situation s'améliorera pour que l'on puisse participer au Festival In- Out Dance Festival, en février 2021 à Bobo Dioulasso au Burkina Faso, et au Festival « Ezzedine Ganoun» en juin 2021 à Tunis, au Théâtre El Hamra.
*Est-ce qu'il s'est déjà produit à Tunis, du moment où il est coproduit par la Cité de la Culture ?
-Oui. Nous l'avons présenté à trois reprises en 2019, notamment dans le cadre des Journées Chorégraphiques de Carthage qui ont eu lieu justement à la Cité de la Culture.
*Pourquoi cet intitulé «Chawchra», que vous signez et interprétez avec Marwen Errouine, et quelles en sont vos intentions ?
-«Chawchra» peut être traduite en Français en « Brouhaha ». Cette « Chawchra » est celle que nous avons dans nos têtes en tant que chorégraphes tunisiens et d'une manière plus globale, en tant qu'artistes.
Nous nous posons la même question depuis plusieurs années : pourquoi, pour qui, créons-nous des œuvres chorégraphiques ? Dans un pays où il y'a très peu de festivals dédiés à la danse, où les salles de spectacle ne sont pas équipées pour accueillir des œuvres comme nous les imaginons, où la question du corps reste de l'ordre de l'intime et du tabou pour beaucoup de Tunisiens.... Devons-nous créer pour les pays occidentaux ? Devons-nous répondre à la demande du grand public avec des œuvres « faciles » ou « commerciales » ? Devons-nous adresser nos œuvres à un public international et répondre à des « fantasmes » occidentaux ? Nous n'avons toujours pas de réponses à ces questions.
*Vous venez d'annoncer sur les réseaux sociaux, une bonne nouvelle : Al Badil est lauréat du programme « Safir ». De quoi s'agit-il au fait ?
-Le programme « Safir » est cofinancé par l'Union Européenne et est porté par l'institut Français. Ce programme vise à accompagner des jeunes de la région MENA (Tunisie, Jordanie, Palestine, Maroc, Algérie, Liban, Egypte) dans la mise en place de projets à impact social, environnemental et culturel. L'association Al Badil a été sélectionnée pour mettre en place un programme d'accompagnement visant à soutenir les projets des jeunes tunisiens. Ce programme durera deux ans. Nous lancerons donc dans les prochains mois, un appel à candidatures.
*En tant que chorégraphe franco-tunisien, parlez-nous de votre parcours professionnel si riche, ainsi que de votre rôle à la tête de l'association Al –Badil- l'Alternative culturelle, créée en 2017.
-J'ai commencé à Tunis dans les années 2000, en intégrant la Compagnie Sybel Ballet Théâtre dirigée par Syhem Belkhodja où j'ai appris les bases de la danse Hip- Hop dans un premier temps, et ensuite la danse contemporaine. En 2008, j'ai rencontré le chorégraphe Imed Jemaa qui m'a invité à danser dans sa pièce « Tounsi ». C'était ma première expérience en tant que professionnel. Imed m'a appris les bases de la création chorégraphique.
En 2010, j'ai quitté la Tunisie pour m'installer en France et intégrer le centre chorégraphique national de Montpellier pour suivre la formation Exerce, parallèlement avec mon Master en Management artistique des projets culturels. La même année, j'ai créé ma Compagnie de danse en France, grâce à laquelle j'ai participé à la biennale africaine « Danse l'Afrique, danse » à Bamako. J'ai décidé très vite de me consacrer à la création de mes propres œuvres et ne pas danser pour d'autres chorégraphes. Grâce au Centre chorégraphique de Montpellier, j'ai réalisé plusieurs créations : « Je ne me reconnais plus », « Femmes », « A jour ».
En 2013, je suis revenu en Tunisie. Je souhaitais transmettre ce que j'ai appris à mes collègues, trouver des solutions pour promouvoir la danse dans mon pays et contribuer à cette révolution culturelle. J'ai alors mis sur pied, le festival Hors- Lits Tunis qui permet la diffusion de créations contemporaines chez l'habitant. C'était pour moi essentiel, de rapprocher le spectacle vivant du citoyen tunisien, et de permettre à mes collègues de continuer à créer.
Al Badil, en tant que structure juridique, a vu le jour en 2017. J'ai fondé cette association avec Farouk Ghazouani et Hejer Aoun ; deux amis qui apportaient un autre regard à la nécessité de créer des leviers pour faire rayonner la culture en Tunisie. Farouk et Hejer sont des professionnels de l'événementiel et la communication. Grâce à eux, j'ai réussi à mieux structurer les projets d'Al Badil.
* Conscient des difficultés vécues en Tunisie, et soucieux de permettre aux artistes de diffuser leurs créations, vous avez déjà initié en 2014, le premier Hors-Lits d'Afrique. Hors-Lits Tunis deviendra ensuite Hors-Lits Tunisie. Pourriez-vous nous en dire plus ?
-En 2013, j'ai participé à Montpellier à un festival qui s'appelait « Hors- Lits » ; l'idée était de faire découvrir au public, des performances artistiques chez l'habitant : dans un salon, une cuisine, un toit... En dehors du lit !
J'ai trouvé l'idée géniale, et en collaboration avec Leonardo Montecchia, l'initiateur de ce projet, j'ai décidé de l'importer en Tunisie. Cette idée permettait d'une part, de trouver une solution au manque d'espaces de diffusion artistique en Tunisie, et d'autre part, de toucher un public qui n'allait pas au Théâtre. Le premier Hors- Lits Tunis a été réalisé en novembre 2014 à la Médina. Les retours du public étaient exceptionnels ; nous avons affiché complet ! J'ai eu envie de renouveler l'expérience dans d'autres espaces, comme La Marsa, La Goulette, Radés, le Centre-ville...
En 2018, avec la création de l'association Al Badil, nous avons rêvé encore plus grand : pourquoi ne pas concevoir un « Hors- Lits » sur l'ensemble du territoire ? Nous avons alors mis en place un processus de formation en Management Culturel, destiné aux jeunes Tunisiens en recherche d'emploi. Ces jeunes entrepreneurs culturels sont devenus nos ambassadeurs sur l'ensemble du territoire. Nous avons réussi grâce à eux, d'initier des « Hors- Lits » à Jendouba, Beja, Bizerte, Sidi Bouzid, Sfax... C'est ainsi que le petit « Hors- Lits Tunis » est devenu « Hors Lits Tunisie ». D'ici 2022, j'aurai la possibilité de déployer ce projet sur l'ensemble des 24 Gouvernorats tunisiens.
*Vous focalisez votre recherche chorégraphique sur la difficulté de créer, sur le rôle de l'art dans les sociétés arabo-musulmanes, sur les pressions sociales subies par les danseurs, et sur l'avenir du métier post-printemps arabe...Comment expliquiez-vous cela ?
-Si tout allait bien dans la vie, j'arrêterais de créer des spectacles ! Je pense que mon rôle en tant qu'artiste, est de questionner, critiquer, interpeller le public sur des sujets divers. En tant qu'artiste tunisien, je me questionne sur la perception de mon métier par le public. Avec un statut d'artiste quasi- inexistant, quelle place avons-nous dans nos sociétés ?
En ces temps de crise sanitaire, le secteur culturel souffre très fortement, et nous entendons trop souvent des commentaires du genre : « oui, mais il y'a plus urgent que l'art en ce moment ». Ce type de réflexion en dit long sur la place du métier d'artiste et sur son avenir incertain.
*Comment arrivez-vous à concilier entre les scènes tunisiennes et françaises ?
-J'ai un planning bien chargé entre les scènes tunisiennes, françaises et mes activités de management auprès d'Al Badil. Je considère le monde comme un grand village où il faut s'adapter en fonction des pratiques, des cultures et des contraintes. Je me déplace presque chaque mois entre différentes villes ou pays, c'est un vrai moteur pour moi. Ce travail est possible grâce à mes équipes à Paris et à Tunis. Je suis accompagné par 4 personnes à plein temps qui font un travail formidable pour coordonner l'ensemble de mes activités.
*Quels sont vos futurs projets, et les possibilités d'assistance et de collaboration avec les jeunes créateurs tunisiens ?
-Artistiquement, je travaille sur une prochaine création chorégraphique qui verra le jour en 2022. Nous commencerons les répétions en octobre 2021.
L'accompagnement des jeunes Tunisiens continue en 2021 avec le projet Hors- Lits, où nous formerons 25 nouveaux jeunes de moins de 30 ans au Management Culturel. Grâce au projet Safir, nous augmenterons notre capacité à accompagner des projets à impact social, environnemental ou culturel. Nous continuons également d'établir des ponts avec des partenaires étrangers. En Juin 2021, nous lancerons le programme Archipel, en partenariat avec le Théâtre Françine Vasse à Nantes, et le Groupe danse partout au Québec, qui permettra l'accueil de 30 professionnels du monde du spectacle, pour rencontrer des jeunes artistes et leur donner des opportunités de développement en France, dans la région de Nantes métropole, et au Québec (Canada).
Propos recueillis par : S.B.Z


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