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« Je me définis comme un Bourguiba démocrate »
Entretien avec : Interview de Omar S'habou, président du Mouvement réformiste tunisien (MRT)
Publié dans La Presse de Tunisie le 05 - 06 - 2011

Omar S'habou n'est pas né de la dernière pluie et on peut dire sans se tromper que sa carrière est bien remplie tant ses champs de prédilection et d'intérêt sont larges et nombreux : le journalisme, la politique et la spiritualité.
Le journaliste a dirigé plusieurs organes de presse du Parti socialiste destourien (PSD) du temps de Bourguiba : l'Action dont il était le rédacteur en chef, Dialogue, une revue hebdomadaire qu'il a dirigée avant de fonder sa propre revue, Le Maghreb (1981-1990), ce qui était là sa manière de s'insurger contre le despotisme grandissant de Bourguiba vers la fin de son règne.
Entre-temps, parti à Paris poursuivre et approfondir ses études (DEA), il en profita, encore et toujours, pour exercer le métier qui l'a toujours passionné à Jeune Afrique, réalisant de grands reportages sur la révolution iranienne.
Le politique a fait un bref passage de 4 mois au ministère de l'Intérieur en tant que directeur général des affaires politiques en 1980.
A l'ère Ben Ali, la répression l'a touché : arrêté à plusieurs reprises, condamné en 1991 à 12 mois de prison pour avoir rencontré des dirigeants de l'opposition en exil, il finit par s'exiler pendant dix ans en France, où il a été élu président de la Ligue du Maghreb pour la démocratie.
De retour, enfin, après le 14 janvier, il fonde son parti le Mouvement réformiste tunisien (MRT) et s'apprête à lancer le Maghreb qu'il a converti en quotidien.
Le spirituel ne regrette pas les pérégrinations qui l'ont amené à connaître de près plusieurs religions et courants spirituels dont le bouddhisme, le taoïsme et surtout le bahaïsme dont il est revenu avec la certitude que l'Islam couvre les fondements spirituels de toutes les autres religions. Nous avons rencontré Omar S'habou sur son propre territoire politique et médiatique, dans un immeuble haut standing de trois étages, à Montplaisir, à Tunis où il coache ses poulains politiques et ses combattants de la plume.
Pourquoi avez-vous décidé de fonder un parti politique, le MRT ?
Je veux contribuer au rassemblement du peuple destourien qui est actuellement orphelin, et quand je dis peuple destourien j'exclus, évidemment, tous ceux et celles qui ont vampirisé le courant réformiste destourien à qui la Tunisie doit tant.
Vous allez donc remplacer Bourguiba
Je n'ai jamais prétendu à cela, mais c'est une démarche qui s'inscrit dans cet esprit, toutes proportions gardées, bien sûr.
Votre parti milite pour que le Tunisien soit ancré dans sa tunisianité. Qu'entendez-vous par tunisianité ?
Je refuse tout simplement de limiter l'identité tunisienne à la dimension arabo-musulmane. Le processus historique est beaucoup plus large que cette unique dimension, fût-elle la plus importante, la plus chère à mon cœur et celle qui a imprimé de ses profondeurs l'identité tunisienne d'aujourd'hui; mais réduire notre identité à la composante arabo-musulmane me semble une négation partielle du moins de notre histoire et de nos spécificités.
Votre parti se propose de remplacer le concept de la laïcité par la neutralité de l'Etat. Pouvez-vous expliciter davantage ce concept ?
C'est simple, nous refusons d'importer un débat qui n'est pas le nôtre et au sujet duquel les controverses demeurent interminables dans le pays même où il est né.
Pourquoi serions-nous obligés de l'importer, d'autant plus que nous l'avons affublé d'un terme désastreux en langue arabe (ilmania) qui a exacerbé les tensions et qui a favorisé les procès d'intention, puisque laïc est devenu synonyme d'athée !
Donc, nous avons choisi de lui substituer le concept de neutralité de l'Etat ou de l'Etat civil, et nous avons fondé cette conception des choses sur des versets coraniques qui interdisent toute immixtion d'une tierce personne ou d'une autorité dans la relation verticale entre Dieu et l'homme.
Comment votre parti appréhende-t-il le type de régime de la nouvelle République ?
Je suis un fervent défenseur du régime semi-présidentiel, je ne crois pas que le tissu politique actuel de notre pays, qui se caractérise par un émiettement des partis (plus de 80), soit de nature à favoriser un parlementarisme qui nous prémunit contre l'instabilité gouvernementale. Le régime semi-présidentiel, dans la mesure où il permet l'élection du président de la République au suffrage universel, et non par le Parlement, présente l'avantage d'assurer la permanence de l'Etat et le fonctionnement dans la durée de ses institutions. En même temps, le Parlement a suffisamment de prérogatives pour contrôler le chef de l'exécutif et le confiner dans ses strictes prérogatives constitutionnelles.
Dans votre plateforme vous comptez substituer, dans les plus brefs délais, l'anglais au français comme 2e langue de base à côté de l'arabe, pourquoi donc ? N'est-ce pas là consacrer la langue seulement comme un outil et non comme une culture également ?
Le français nous a été imposé par l'histoire, et nous l'avons adopté comme outil d'ouverture sur le monde occidental. Il n'est pas un organe de dépendance organique avec la France. Je considère qu'aujourd'hui l'outil linguistique, qui nous permet une ouverture non plus seulement sur le monde occidental mais sur l'ensemble du monde est l'anglais.
La greffe de l'anglais ne sera pas faite ex-nihilo, mais elle va s'ajouter à un substrat culturel occidental. Cela dit, je ne préconise pas le remplacement brutal mais progressif.
Votre parti se réclame de la pensée bourguibienne réconciliée avec la démocratie, mais il y a aussi cette dimension despotique bourguibienne.
Je crois toujours à la dimension réformiste de la pensée bourguibienne, mais je me suis insurgé contre son autoritarisme et sa conception plutôt despotique dans l'exercice du pouvoir, la preuve j'ai rompu avec son régime en 1980 pour créer la revue Le Maghreb (1981-1990) qui aura été un support incontestable du mouvement démocratique tunisien.
Donc, je revendique ma filiation par rapport à la pensée réformiste tout en récusant l'aspect dictatorial et je me définis comme un Bourguiba démocrate.
Pensez-vous qu'en 2011 le peuple va voter pour un parti qui se réclame de Bourguiba ou pour un Bourguiba démocrate ?
Je pense qu'il y a au sein de notre peuple un lien non négligeable qui reste imprégné du réformisme bourguibien et qui peut se retrouver dans cette façon de voir.
Dans la plateforme politique du MRT, vous ne cachez pas votre ambition de briguer les leviers de commande. Mais est-ce réaliste, vu que votre parti n'a que deux mois d'existence?
La vocation naturelle d'un parti est d'accéder au pouvoir pour concrétiser ses idées quel qu'en soit l'âge. Pour ce qui est de Omar S'habou, son parcours politique et médiatique est bien antérieur au parti qu'il a constitué. Il a, si vous voulez, une légitimité en soi. Le parti peut bénéficier de la longévité du parcours de son fondateur.
Maintenant en tant que parti, que pensez-vous des chiffres sur la présence des partis sur les plateaux de télévision, Ennahdha, Ettajdid et le PDP occupant, selon un certain sondage, la tête de liste…
Dès lors qu'il n'y a pas de loi organisant la campagne électorale, on ne peut faire de reproche à qui que ce soit. Ce n'est ni normal, ni exemplaire, au vu de ces chiffres, mais cela indique l'urgence qu'il y a à créer une institution comme celle qui veille, en France, à réguler la représentativité des partis et de leur activité dans les médias de manière équitable.
Maintenant, parlons de la situation politique actuelle ? Comment l'analysez-vous ?
Je la ramène à une dialectique que je considère positive entre les forces qui veulent faire aboutir la révolution à son terme et les forces qui ne l'entendent pas de cette oreille, qui peuvent se manifester à travers des institutions, des corps constitués, des personnes et des cartels d'intérêts.
Donc, ce que je constate c'est que cette dialectique est en train d'être soutenue par ce que j'appelle un pacte consensuel implicite de l'écrasante majorité des Tunisiens, et c'est grâce à ce pacte que malgré tout l'Etat est encore debout et la Tunisie aussi.
Etes-vous pour le report de l'élection de la Constituante au 16 octobre 2011?
Oui bien sûr, absolument. Parce que les raisons avancées par l'Instance des élections sont logiques, irréfutables, convaincantes et incontournables.
Seuls ceux qui ont des arrière-pensées électoralistes sont frappés de cécité.
Comment évaluez-vous le rendement de la justice concernant les affaires de corruption et de malversations ?
Il est insuffisant et incompréhensible, je ne comprends toujours pas pourquoi ce n'est pas le parquet qui poursuit, de par sa fonction naturelle, les cas de corruption.
Faut-il imputer cette lenteur à un pouvoir occulte‑?
Je ne sais pas. Je me limite à constater que ce fait est à la limite de l'absurde.
Etes-vous satisfait, d'autre part, de la situation sécuritaire ?
Si on prend les choses au cas par cas, la situation peut paraître dramatique, mais au vu de l'ensemble du pays, les forces de l'ordre, toutes catégories confondues, et l'armée nationale sont en train d'avancer dans l'instauration de la sécurité. Cela est dû, à mon sens, à un changement de paradigme qui est en train de s'opérer dans la neutralité même des forces de l'ordre.
Maintenant, en se focalisant sur Omar Shabou, l'homme. D'aucuns s'interrogent sur les zones d'ombre de votre parcours spirituel. Qu'en dites-vous ?
Mon rapport à la religion a connu un tournant décisif à l'âge de 24 ans, quand j'ai décidé, à propos du Coran, d'en avoir définitivement le cœur net : est-il une œuvre divine ou humaine ?
Après trois lectures approfondies du Coran, j'ai fini par admettre que le saint Coran est bien l'œuvre d'une autorité divine en raison des «Iâjaz» (miracles) de toutes sortes qui l'imprègnent. J'ai commencé alors à appliquer à la lettre ses préceptes et recommandations dont le «Haj» que j'ai effectué à l'âge de 30 ans, mais j'ai continué à m'intéresser à la spiritualité universelle. J'ai toujours eu soif de percer les mystères de l'invisible et de l'au-delà.
Cette soif m'a conduit à approfondir mes connaissances des autres religions comme l'hindouisme (krishna), le bouddhisme (shakiamuni), le taoïsme (l'ouste), l'ismaélisme et le bahaïsme.
J'ai découvert dans cette spiritualité certains préceptes universels, qui répondent à ma vision de la vie, jusqu'à ce que je découvre en 1995, qu'elle est une mystification, puisqu'elle prétend, entre autres, que l'humanité allait entrer en masse dans ses rangs dès l'année 1990. Ce qui est une parfaite absurdité démentie par les faits: ceux qui en sortent sont toujours plus nombreux que ceux qui y entrent.
Toutefois, je ne regrette pas d'avoir fait toutes ces pérégrinations spirituelles.
J'ai acquis la certitude que l'Islam est la religion qui couvre les fondements spirituels de toutes les autres. Mais, j'ai une lecture tunisienne du Coran et de l'Islam, celle qu'ont initiée les cheikhs Mohamed Nakhli, Taher et Fadhel Ben Achour, puis les Haddad, Bourguiba et que poursuivent les Mohamed Talbi, Hichem Djaïet, Raja Ben Slama, Abdelmajid Charfi, Olfa Youssef et autres.
Pour terminer êtes-vous optimiste quant à l'avenir du pays ?
Je suis fondamentalement optimiste. S'il y a un seul peuple arabe qui puisse réussir dans la construction d'une société démocratique, c'est bien le peuple tunisien, grâce à son génie propre, grâce aux réformes structurelles initiées par Bourguiba au lendemain de l'indépendance.
Etes-vous candidat à l'élection présidentielle‑?
Ne bousculons pas les choses. Il est encore tôt pour me prononcer. Aujourd'hui le plus urgent est de contribuer activement à la pleine réussite de la transition démocratique et de doter la Tunisie d'une Constitution digne des aspirations de son peuple.


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