L'offre se limite à 1.200 moutons. Les ventes sont timides. Les intermédiaires règnent en maîtres, au détriment du droit du consommateur à la transparence. Les responsables de l'Organisation de défense du consommateur (ODC) ont choisi de se déplacer, avant-hier, à la «rahba» relevant de la société Ellouhoum, à El Ouardia, pour une action de contrôle portant sur les prix pratiqués et sur l'état de santé du cheptel. La visite a été perçue avec autant d'étonnement que de perplexité. Sans préavis ni autorisation préalable, M. Fathi Fadhli, PDG de la société Ellouhoum, s'était trouvé dans l'obligation d'avancer des informations qui dénotent le «flou» qui caractérise cette période pré-évènement. A quelques jours seulement de l'Aïd, la «rahba» ne compte que 1.200 moutons ; une offre assez timide, garantie par des agriculteurs, des éleveurs et – surtout – des intermédiaires. Encore faut-il préciser que la «rahba» n'est autre qu'un espace mis à la disposition des agriculteurs et des intermédiaires pour exposer leurs moutons. Un espace contrôlé un tant soit peu et qui ne correspond point au principe de l'unité de vente réglementée et contrôlée selon des normes bien définies. « Les prix pratiqués à la «rahba» varient selon l'offre et la demande. Depuis quelques jours, la vente se limite à la vente en masse. Certains intermédiaires se déplacent jusqu'à la «rahba» pour acheter une vingtaine ou une trentaine de moutons », indique M. Fadhli. Et de préciser que la vente en détail reste minime par rapport à la normale. Manifestement, et en raison de la baisse notable du pouvoir d'achat des Tunisiens, des dépenses interminables relatives aux vacances, à la rentrée ainsi qu'aux différentes charges des ménages, bon nombre de Tunisiens auront plus tendance à sacrifier le plaisir et la joie de l'Aïd plutôt qu'à sacrifier un mouton et allonger la liste des dettes. Aussi, la société Ellouhoum a-t-elle pris les précautions nécessaires pour assurer une offre importante en viande rouge. Les tarifs sont fixés Toujours selon M. Fadhli, la société assure près de 100 tonnes de viande par jour. «Nous collaborons, indique-t-il, avec des bouchers, spécialisés dans la vente des viandes importées. Ces bouchers, qui obéissent à un contrôle régulier de la part des parties concernées, sont implantés à Tunis, à l'Ariana, à Sfax et à Bizerte. Les tarifs fixés par la société Ellouhoum sont clairs : le kilo de viande de veau est fixé à 16 dinars, 17d pour la viande de mouton et 18d pour un kilo de foie». S'agissant de la vente réglementée des moutons, c'est-à-dire au kilo, les tarifs sont fixés à 10dt500 le kg pour les moutons dont le poids excède les 40 kg et à 11dt500 le kg pour les moutons dont le poids est inférieur à 40 kg. Les parties concernées ont failli à leurs engagements ! Certes, les tarifs sont bien définis. Cependant, les unités de ventes réglementées ne sont toujours pas opérationnelles. C'est le cas, d'ailleurs, de l'unité de vente censée être implantée à la société Ellouhoum. «Ces points de vente ont été annoncés pourtant par le ministère de l'Agriculture et des Ressources hydrauliques et par l'Union des agriculteurs ; deux institutions concernées qui ont pris en charge ce dossier, en vain. A quelques jours de l'Aïd, les consommateurs ne disposent toujours pas de ces unités de vente, ce qui donne libre cours aux agriculteurs et aux intermédiaires de régner en maîtres et d'avoir le dernier mot», souligne Mme Sana Oueslati, médecin vétérinaire et membre de l'ODC chargée du contrôle des produits agricoles et de la pêche. Faute d'unités de vente réglementées, les Tunisiens restent réticents quant à l'achat du mouton de l'Aïd. Parmi les quelques clients qui sillonnent la «rahba», rares sont ceux qui la quittent en emmenant un mouton. «Pourtant, le mouton est disponible à seulement 270 dinars, et ce, dans les unités de vente situées à Kairouan, Sidi Bouzid, Kasserine et Sbikha. Certains intermédiaires font l'acquisition du bétail à des prix raisonnables, pour le vendre dans les villes à des prix bien gonflés», souligne M. Slim Saâdallah, président de l'ODC. Le respect des normes convenues et qui garantissent la vente des moutons au kilo s'impose afin d'encourager le Tunisien à acheter un mouton, tout en étant assuré quant à son droit à la transparence commerciale. Un consommateur avisé et responsable saurait faire pression sur le marché, rationaliser les prix et faire face à la spéculation imposée par les intermédiaires.