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Gouvernement, parlement, justice, c'est fait ; restent les syndicats et les médias
Publié dans Business News le 07 - 02 - 2022

C'est l'histoire d'un jeune stagiaire qui fait tout pour s'imposer dans l'entreprise et obtenir ainsi son CDI. Pour bien se faire voir, il ramène le matin des croissants à son patron et le soir, il est toujours là pour effectuer des heures supplémentaires. A la fin du stage, le verdict tombe, il n'est pas pris. Déboussolé, ne comprenant pas où il a fauté, il est allé demander le pourquoi de son stage non concluant. La réponse fut très brève. « Mon petit, si on te recrute ici, c'est pour faire ton travail, pas pour ramener des croissants. Et si tu observes des heures supplémentaires, c'est que tu ne réussis pas à effectuer ton travail dans les temps. »
Depuis six mois et demi qu'il s'est accaparé tous les pouvoirs, Kaïs Saïed est comme ce stagiaire. Il fait ce qu'on ne lui demande pas de faire et il observe des heures supplémentaires pour nous montrer qu'il travaille trop.
La priorité de l'heure est économique. Les caisses de l'Etat sont vides, on peine à boucler les salaires et le gouvernement n'a pas de plan B au cas où le FMI ne lui prête pas l'argent qu'il demande.
Plutôt que de s'occuper des finances du pays et trouver des solutions efficaces pour renflouer les caisses, booster la croissance et résorber le chômage, le président est occupé à asseoir son pouvoir.
Plutôt que de travailler comme tout le monde du lundi au vendredi, le président prend des décisions dans la nuit du samedi à dimanche, vers minuit et demi, question de montrer qu'il travaille sans heure.
C'est une évidence, le président a une lecture primaire et artisanale de la vie politique et de la vie publique, voire de la vie tout court.

Samedi 5 février en milieu d'après-midi, le ministère de l'Intérieur publie un communiqué pour rappeler les restrictions sanitaires et, de là, l'interdiction de toute manifestation. En ligne de mire, la manifestation prévue le lendemain commémorant le décès du martyr Chokri Belaïd.
Vers minuit et demi, le président de la République s'invite au siège du ministère pour contrecarrer le communiqué et autoriser la manifestation. Le même, il y a trois semaines, s'élevait contre la manifestation qui s'opposait à lui et appelait au respect de la loi et des restrictions sanitaires.
Durant son speech d'une vingtaine de minutes, Kaïs Saïed annonce la dissolution du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Pourquoi à cette heure tardive et un week-end ? Pourquoi pas vendredi ou lundi ? Malin est celui qui apportera une réponse à ces deux questions.
Ne cherchez pas trop loin, il faut bien connaitre le président pour comprendre son état d'esprit. Avec sa lecture primaire, le président pense envelopper sa décision de dissolution du CSM par son autorisation de la manifestation. Il obtiendrait ainsi comme un blanc-seing de la gauche et de tous ceux remontés contre la manipulation judiciaire odieuse du dossier du martyr. C'est aussi une diversion pour qu'on oublie les retards dans le versement des salaires et les caisses vides de l'Etat.
Après avoir dissous le gouvernement et gelé l'assemblée un dimanche soir, Kaïs Saïed dissout le CSM à minuit et demi le week-end. Il en profite, dans la foulée, pour rappeler sa bouffonnerie comme quoi la justice est une fonction et non un pouvoir. Il répète son mensonge comme quoi il ne s'est jamais immiscé dans le travail des magistrats.

Dans un pays normalement constitué, dans un Etat qui se respecte, chez une population sensée, cultivée et consciente, ce qui s'est passé samedi est pire qu'un gros séisme, il s'agit d'une journée noire. Si vous pensez le contraire, c'est que vous êtes un sujet et non un citoyen, un bipède et non un être civilisé, un consommateur et non un acteur, un passif et non un actif.
Ce qui s'est passé samedi veut dire que le président de la République a fait main basse sur l'ensemble de l'appareil de l'Etat.
Le 25 juillet 2021, il s'est arrogé les pleins pouvoirs et sa popularité est montée d'un cran. Crédules, les Tunisiens ont pensé qu'il allait sauver le pays. Six mois et demi plus tard, rien n'a été résolu, tout a empiré.
Le 6 février 2022, il s'est permis en toute illégalité de dissoudre le CSM et il y a eu des applaudissements. Crédules, certains pensent qu'il va réformer l'appareil judiciaire et écarter les magistrats véreux. Rendez-vous dans six mois et je vous parie qu'il ne réformera rien du tout. Il va juste mettre les magistrats sous sa coupe.
Kaïs Saïed ne veut pas d'une justice indépendante, Kaïs Saïed veut une justice aux ordres. Kaïs Saïed veut mettre tout le pays sous sa coupe. Il veut être le président tout puissant qui décide tout sur tout.
Qu'a fait de bon Kaïs Saïed depuis son élection en 2019 ? Rien, absolument rien, même pas un projet de loi. Qu'a fait de bon Kaïs Saïed depuis son putsch de juillet 2021 ? Rien. Il n'a eu de cesse de parler de milliards dérobés, mais il n'a pas restitué à l'Etat un dinar depuis six mois et demi. Il n'a eu de cesse de parler de spéculateurs et de voleurs, mais tous ceux qu'il a fait jeter en prison (ou mis en résidence surveillée) ont été blanchis par les juges instructeurs. Il n'a eu de cesse de parler d'entreprises et d'emplois, mais il n'a pas réussi à en créer un seul. Il n'a eu de cesse de s'élever contre le népotisme, mais il n'a fait que nommer des amis sans CV à des postes-clé de l'Etat, le meilleur exemple est son « bodybuilder » gouverneur de Ben Arous. Aux yeux de Kaïs Saïed, tu es suspect si tu es un riche chef d'entreprise, mais tu es patriote si tes biceps sont ton seul souci dans la vie.

Maintenant qu'il a pris tous les pouvoirs et qu'il a officiellement mis la justice sous sa coupe, que va faire Kaïs Saïed ? Qui lui résiste déjà ? Qui s'est élevé contre lui après sa décision de samedi minuit ?
Désunie, inaudible et très peu nombreuse, l'opposition patauge. Les magistrats, premiers intéressés, sont quasi-silencieux. Ils ont observé une grève de deux mois pour une prime, mais ils sont inertes face au bulldozer qui attaque leur édifice. Le patronat, fidèle à son habitude, est lâche. Les avocats, contrairement à leurs habitudes, ont rapidement baissé le pantalon.
Si les magistrats ne se lèvent pas tout de suite pour défendre leur corporation et s'ils acceptent d'être une serpillère sous les pieds de Kaïs Saïed, il ne restera que les syndicats et les journalistes pour lui résister. Très peu pour faire face à un despote-stagiaire, apprenti-dictateur.
Les syndicats sont puissants et ont la capacité de bloquer le pays, mais il n'est pas dans leurs prérogatives de sauver le pays et de jouer le rôle des partis.
Les journalistes représentent le 4e pouvoir, certes, mais (bon à rappeler) ils exercent dans des médias appartenant à des chefs d'entreprise qui ne pensent qu'à leurs propres intérêts. Et, de toute façon, ce n'est pas dans leurs prérogatives de sauver le pays et de jouer le rôle des partis.
La capacité de nuisance des syndicats et des médias est bien réelle, mais elle ne saurait être suffisante quand les autres corporations sont cachées sous le lit.
Tôt ou tard, Kaïs Saïed finira par mettre les syndicats et les médias sous sa botte, c'est une suite logique.

Kaïs Saïed a été élu pour des prérogatives bien déterminées et il les a outrageusement dépassées. Il s'est arrogé des pouvoirs que ses 2,777 millions d'électeurs ne lui ont pas donnés. Il a gelé 217 parlementaires élus par 2,946 millions de citoyens. Kaïs Saïed a volé nos voix et a volé nos institutions. Il l'a fait au nom de la réforme, mais il n'a rien réformé et il ne peut rien réformer.
Il n'existe aucun pays au monde qui n'a pas d'assemblée. Il n'existe aucun pays au monde où la justice est considérée comme une fonction et non comme un pouvoir. Il n'existe aucun pays au monde où le président confond millions et milliards. Il n'existe aucun pays au monde où le gouvernement n'a pas de plan B pour financer son budget.
Que faire face à ce Frankenstein ? C'est aux citoyens sensés, patriotes, mus par les intérêts supérieurs de l'Etat et de la nation de réagir. L'Histoire des peuples nous a appris que la démocratie est le pire des régimes à l'exception de tous les autres (Winston Churchill). L'Histoire des peuples nous a appris que la justice est le fondement de tout et qu'elle doit être rendue au nom du peuple et pas au nom du chef. L'Histoire des peuples (et la nôtre) nous a appris que le pouvoir d'un homme n'est jamais bon. Elle nous a appris qu'un chef rassemble et ne divise point son peuple. Tunisiens, réveillez-vous, le feu est déjà dans la maison et il va nous consumer tous, bien plus tôt que vous le pensez !


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